communiqué de presse du 15 mai 2006


Le porte-amiante Clemenceau France

 Aujourd'hui un procès à Marseille et mercredi le Clemenceau à Brest

 

En dépit de la légitimité de la campagne menée contre l'exportation du Clemenceau, reconnue a posteriori par le Conseil d'Etat, sept activistes de Greenpeace sont convoqués aujourd'hui lundi 15 mai à 14 heures au Tribunal correctionnel de Marseille (chambre spécialisée en matière militaire). Ils risquent un an d'emprisonnement et 15 000 euros d'amende pour "pénétration non autorisée sur un engin militaire" (le 12 décembre à Toulon ; le 12 janvier au large du Canal de Suez).

Dernière minute : procès reporté au 16 octobre!

Coup de théâtre. A deux jours de l'arrivée du Clemenceau en rade de Brest, le procès des sept activistes de Greenpeace poursuivis pour être montés à bord de l'ex porte-avions le 12 décembre à Toulon et le 12 janvier au large du Canal de Suez, a été reporté au lundi 16 octobre.

Les activistes accompagnés de Yannick Jadot, directeur des campagnes de Greenpeace France, et d'Alexandre Faro, l'avocat de l'association, étaient convoqués à 14 heures à la chambre militaire du tribunal correctionnel de Marseille. A peine installés dans la salle d'audience, les prévenus ont appris par la présidente de la chambre que le procès était reporté au 16 octobre en raison de l'indisponibilité des deux magistrats spécialisés en matière d'affaires militaires. La présidente a également regretté que les prévenus n'aient pas été averti plus à l'avance de cette décision prise il y a un mois. Les sept activistes (trois Français, deux Belges, un Danois et un Indien) risquent un an d'emprisonnement et 15 000 euros d'amende pour " pénétration non autorisée sur un engin militaire ".

"Nous avons fait le trajet pour rien, mais il y a fort à parier que ce contre-temps ne déplaît pas à tout le monde, plaisantait Yannick Jadot en sortant du Tribunal. Le ministère de la Défense doit s'en féliciter. Le combat de nos activistes ayant été légitimé a posteriori par le Conseil d'Etat, le ministère de la Défense courrait en effet le risque de voir relaxer nos militants, à deux jours de la vaste opération de communication qu'il organise pour l'occasion !"

Alors que le Clemenceau est attendu mercredi 17 mai au matin dans le port de Brest, Greenpeace, l'Andeva, le Comité anti-amiante Jussieu, Ban Asbestos et la FIDH se réjouissent que ce cas exemplaire en matière d'exportation de déchets toxiques ait permis le lancement, en France, d'une vraie dynamique de travail sur la gestion des navires en fin de vie, dans le respect de la santé des travailleurs et de l'environnement. "Le chemin emprunté par le Clemenceau aura été long et sinueux pour arriver à ce que nous demandions depuis des années, rappellent les porte-parole des associations. De telles tempêtes médiatiques sont parfois nécessaires pour que les Etats prennent réellement en charge des dossiers que jusque-là ils ignoraient - ou feignaient d'ignorer."

Grâce à la campagne contre l'exportation de cette coque toxique, menée par cette coalition d'associations et les syndicats de travailleurs indiens, c'est toute la filière de démolition des navires en fin de vie qui est en train d'évoluer. D'abord avec l'engagement de la France pour développer des filières européennes de dépollution. Ensuite avec la perspective de transferts Nord/Sud de technologies et de compétences, pour doter les chantiers de démolition d'Asie du Sud des capacités de gestion des substances toxiques. Enfin, avec le coup de projecteur donné sur la précarité des conditions de travail des ouvriers dans les chantiers asiatiques. Par crainte de nouvelles pertes de contrat, les responsables de ces chantiers commencent semble-t-il à prendre des mesures.

"Voilà enfin la mise en œuvre du droit international sur l'interdiction d'exporter des déchets toxiques vers les pays du Sud, pour lequel Greenpeace se bat depuis plus de 20 ans dans le monde entier (1)" déclare Yannick Jadot, directeur des campagnes de Greenpeace France. "Nous resterons vigilants quant à l'indépendance de l'expertise qui sera réalisée sur la coque pour évaluer les substances toxiques à bord, en particulier le respect des réglementations amiante", ajoute Michel Parigot, président du Comité anti-amiante Jussieu et vice-président de l'Andeva. "De même, nous veillerons à ce que la stratégie française s'inscrive dans une perspective européenne (2) et renforce le travail mené par l'Organisation maritime internationale (OMI), l'Organisation internationale du travail (OIT) et la Convention de Bâle", souligne pour sa part Annie Thébaud-Mony, porte-parole de Ban Asbestos.

Regroupées au sein d'une coalition européenne, les organisations écologistes, anti-amiante et de défense des droits de l'Homme ont publié un rapport intitulé : Démolition navale, défis et responsabilités pour l'Union européenne. "L'histoire du Clemenceau démontre la capacité de la société civile à faire prévaloir le droit sur des considérations purement économiques, conclut Sidiki Kaba, président de la FIDH. Et si la France fait preuve d'initiative en matière de démantèlement au niveau européen, elle sortira grandie de cette affaire. Ce ne sera pas la moindre de nos victoires."

 

Notes:

(1) - www.greenpeaceweb.org/shipbreak

(2) - Voir la stratégie élaborée par la Grande-Bretagne ; et le discours de Stavros Dimas, commissaire européen à l'Environnement.