En
dépit de la légitimité de la
campagne menée contre l'exportation du Clemenceau,
reconnue a posteriori par le Conseil d'Etat, sept
activistes de Greenpeace sont convoqués
aujourd'hui lundi 15 mai à 14 heures au Tribunal
correctionnel de Marseille (chambre
spécialisée en matière militaire).
Ils risquent un an d'emprisonnement et 15 000 euros
d'amende pour "pénétration non
autorisée sur un engin militaire" (le 12
décembre à Toulon ; le 12 janvier au large
du Canal de Suez).
Dernière
minute : procès reporté au 16
octobre!
Coup de
théâtre. A deux jours de l'arrivée du
Clemenceau en rade de Brest, le procès des sept
activistes de Greenpeace poursuivis pour être
montés à bord de l'ex porte-avions le 12
décembre à Toulon et le 12 janvier au large
du Canal de Suez, a été reporté au
lundi 16 octobre.
Les activistes
accompagnés de Yannick Jadot, directeur des
campagnes de Greenpeace France, et d'Alexandre Faro,
l'avocat de l'association, étaient
convoqués à 14 heures à la chambre
militaire du tribunal correctionnel de Marseille. A peine
installés dans la salle d'audience, les
prévenus ont appris par la présidente de la
chambre que le procès était reporté
au 16 octobre en raison de l'indisponibilité des
deux magistrats spécialisés en
matière d'affaires militaires. La
présidente a également regretté que
les prévenus n'aient pas été averti
plus à l'avance de cette décision prise il
y a un mois. Les sept activistes (trois Français,
deux Belges, un Danois et un Indien) risquent un an
d'emprisonnement et 15 000 euros d'amende pour "
pénétration non autorisée sur un
engin militaire ".
"Nous avons fait
le trajet pour rien, mais il y a fort à parier que
ce contre-temps ne déplaît pas à tout
le monde, plaisantait Yannick Jadot en sortant du
Tribunal. Le ministère de la Défense doit
s'en féliciter. Le combat de nos activistes ayant
été légitimé a posteriori par
le Conseil d'Etat, le ministère de la
Défense courrait en effet le risque de voir
relaxer nos militants, à deux jours de la vaste
opération de communication qu'il organise pour
l'occasion !"
Alors que le
Clemenceau est attendu mercredi 17 mai au matin dans le
port de Brest, Greenpeace, l'Andeva, le Comité
anti-amiante Jussieu, Ban Asbestos et la FIDH se
réjouissent que ce cas exemplaire en
matière d'exportation de déchets toxiques
ait permis le lancement, en France, d'une vraie dynamique
de travail sur la gestion des navires en fin de vie, dans
le respect de la santé des travailleurs et de
l'environnement. "Le chemin emprunté par le
Clemenceau aura été long et sinueux pour
arriver à ce que nous demandions depuis des
années, rappellent les porte-parole des
associations. De telles tempêtes médiatiques
sont parfois nécessaires pour que les Etats
prennent réellement en charge des dossiers que
jusque-là ils ignoraient - ou feignaient
d'ignorer."
Grâce
à la campagne contre l'exportation de cette coque
toxique, menée par cette coalition d'associations
et les syndicats de travailleurs indiens, c'est toute la
filière de démolition des navires en fin de
vie qui est en train d'évoluer. D'abord avec
l'engagement de la France pour développer des
filières européennes de dépollution.
Ensuite avec la perspective de transferts Nord/Sud de
technologies et de compétences, pour doter les
chantiers de démolition d'Asie du Sud des
capacités de gestion des substances toxiques.
Enfin, avec le coup de projecteur donné sur la
précarité des conditions de travail des
ouvriers dans les chantiers asiatiques. Par crainte de
nouvelles pertes de contrat, les responsables de ces
chantiers commencent semble-t-il à prendre des
mesures.
"Voilà
enfin la mise en uvre du droit international sur
l'interdiction d'exporter des déchets toxiques
vers les pays du Sud, pour lequel Greenpeace se bat
depuis plus de 20 ans dans le monde entier (1)"
déclare Yannick Jadot, directeur des campagnes de
Greenpeace France. "Nous resterons vigilants quant
à l'indépendance de l'expertise qui sera
réalisée sur la coque pour évaluer
les substances toxiques à bord, en particulier le
respect des réglementations amiante", ajoute
Michel Parigot, président du Comité
anti-amiante Jussieu et vice-président de
l'Andeva. "De même, nous veillerons à ce que
la stratégie française s'inscrive dans une
perspective européenne (2) et renforce le travail
mené par l'Organisation maritime internationale
(OMI), l'Organisation internationale du travail (OIT) et
la Convention de Bâle", souligne pour sa part Annie
Thébaud-Mony, porte-parole de Ban
Asbestos.
Regroupées
au sein d'une coalition européenne, les
organisations écologistes, anti-amiante et de
défense des droits de l'Homme ont publié un
rapport intitulé : Démolition navale,
défis et responsabilités pour l'Union
européenne. "L'histoire du Clemenceau
démontre la capacité de la
société civile à faire
prévaloir le droit sur des considérations
purement économiques, conclut Sidiki Kaba,
président de la FIDH. Et si la France fait preuve
d'initiative en matière de
démantèlement au niveau européen,
elle sortira grandie de cette affaire. Ce ne sera pas la
moindre de nos victoires."
Notes:
(1) -
www.greenpeaceweb.org/shipbreak
(2) - Voir la
stratégie élaborée par la
Grande-Bretagne ; et le discours de Stavros Dimas,
commissaire européen à
l'Environnement.