Paris, 16
janvier 15 heures. La Cour Suprême indienne a
décidé aujourd'hui que le Clemenceau
était illégal dans la Zone
économique exclusive, correspondant à 220
miles nautiques, au moins jusqu'au 13 février
prochain, date de sa prochaine réunion. D'ici
là, sa commission spéciale va continuer ses
auditions et produire un rapport sur le Clemenceau. Le 6
janvier dernier, cette même commission avait
émis un avis négatif, considérant le
Clemenceau comme un déchet toxique, et avait
recommandé son interdiction dans les eaux
territoriales indiennes.
" Ce qui est
devenu une affaire d'Etat depuis que la France a
retourné la position officielle égyptienne
en violant explicitement la Convention de Bâle,
n'est pas terminé. La seule question qui demeure
est d'ordre moral : la France peut-elle se
débarrasser d'un déchet très toxique
en l'exportant dans un pays du Sud ? " s'interroge
Yannick Jadot directeur des campagnes de Greenpeace
France.
Les arguments
techniques déployés par l'Etat
français ne tiennent pas : la Convention de
Bâle couvre sans équivoque tous les navires
en fin de vie, quelque soit leur statut légal
(Décision 26 prise lors de la
7ème Conférence des Parties de
2004 (cf. le point juridique de Ban Asbestos en page 2 de
ce CP). Il est de ce point de vue affligeant que la
Ministre française de l'Environnement,
officiellement garante de la Convention de Bâle,
ait prêté son concours à cette
mascarade. De même, la communication du
Ministère de la Défense insistant sur le
fait que le navire sera désamianté puis
démoli est tout aussi fallacieuse : les conditions
d'un désamiantage protégeant effectivement
la santé des ouvriers indiens et l'environnement
sont pour le moment impossibles à réunir
dans les chantiers d'Alang.
" Les
autorités françaises doivent cesser cette
politique cynique et arrogante qui
détériore fortement l'image de la France.
Pendant plus de trois décennies, l'Etat
français a ignoré la catastrophe sanitaire
de l'amiante sur son territoire et ses dizaines de
milliers de morts. Comment peut-il même envisager
d'exporter un tel scandale ? Le pays des Droits de
l'Homme a mal. Le Clemenceau devient la honte de la
France ! " conclut Yannick Jadot.
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Repères
sur la Convention de Bâle
L'ensemble du
texte est consultable sur
http://www.basel.int/text/textfranc.html
Entrée
en vigueur en 1992, elle concerne " le contrôle des
mouvements transfrontières de déchets
dangereux et de leur élimination ". Elle est
signée entre autres pays par la France, l'Inde et
l'Egypte. Elle précise que tout trafic
illégal de déchets est criminel (art 4-3)
et doit conduire à des poursuites contre les
individus responsables.
Elle a pour objet
de contrôler et réguler tout transfert de
mouvements transfrontières de déchets
dangereux risquant de porter atteinte à la
santé humaine et à
l'environnement.
En son article1
elle définit les " déchets dangereux "
pouvant faire l'objet de mouvements
transfrontières. L'amiante en fait partie par
référence à l'annexe I, code Y 36 et
à l'annexe III, code 9 H 11.
Elle n'exclut que
la seule catégorie des déchets radioactifs,
et elle ne limite en pourcentage dans un matériau
que les seuls PCB inclus dans les solides
(quantité supérieure à
50mg/Kg).
Elle n'inclue
aucune dérogation pour le matériel de
guerre ou les navires de guerre.
Elle interdit
l'exportation de déchets dangereux ou d'autres
déchets si l'Etat d'importation (ici l'Inde) et
l'Etat de transit (ici l'Egypte) n'ont pas donné
par écrit " l'accord spécifique pour
l'importation de ces déchets, dans le cas
où l'Etat d'importation n'a pas interdit
l'importation de ces déchets ", or l'Inde a
interdit toute importation des déchets d'amiante
depuis 2003.
Enfin les
signataires se sont engagés à prendre les
mesures requises pour que les mouvements
transfrontières de déchets dangereux et
autres déchets ne soient autorisés que si
l'Etat d'exportation (la France) ne dispose pas des
moyens techniques et des installations nécessaires
pour éliminer les déchets en question selon
des méthodes écologiquement rationnelles et
efficaces. Or la France a dix ans d'expérience
dans des opérations de désamiantage
hautement sécurisées, et l'Inde n'a ni
matériel, ni expérience en ce
domaine.