Par une lettre
ouverte à la Ministre des Armées en date du
20 décembre 2004, les organisations
soussignées ont tenté d'alerter l'opinion
publique sur deux points :
- les conditions
anormales dans lesquelles se déroule
actuellement le désamiantage du porte-avions
Clemenceau,
- l'exportation
prévue vers l'Inde de 22 tonnes de
déchets d'amiante au mépris de la
santé des travailleurs indiens.
Faute de réponse de
la Ministre, il nous semble indispensable de revenir sur
ces deux points.
La protection des
travailleurs sur l'actuel chantier paraît nettement
insuffisante.
Les photos parues dans la
presse (cf. par exemple La Marseillaise du 5 janvier
2005) montrent des travailleurs ne portant que des
demi-masques, très insuffisants pour les
opérations de désamiantage, d'où
l'inquiétude sur les réelles conditions de
travail.
Il est indispensable que
ces travaux soient sévèrement
contrôlés, le désamiantage des
navires étant une opération
particulièrement polluante. D'où la
nécessité d'une inspection du chantier par
exemple par l'INRS ou un service de prévention des
CRAM.
L'envoi de 22 tonnes de
déchets d'amiante en Inde est
illégal.
Le règlement (CEE)
n° 259/93 du Conseil du 1er
février 1993 stipule (art. 14) que " sont
interdites toutes les exportations de déchets
destinés à être
éliminés, à l'exception de celles
effectuées vers les pays de l'Association
européenne de libre échange (AELE) qui sont
également parties à la Convention de
Bâle. "
Or, l'amiante est
classé dans la liste rouge (annexe IV) du
même règlement communautaire, et
d'évidence il s'agit d'un déchet
destiné à être
éliminé.
Par ailleurs, l'Inde n'est
pas membre de l'AELE. Enfin, la Convention de Bâle
du 22 mars 1989 sur le contrôle des mouvements
transfrontières de déchets dangereux et de
leur élimination, signée par la France et
l'Inde, prévoit que (article 4-9-a) ces mouvements
sont interdits si l'état exportateur dispose des
moyens permettant l'élimination de ces
déchets.
Or, l'élimination de
l'amiante dans les bateaux - opération
particulièrement complexe et difficile si on veut
qu'elle soit réalisée sans danger - n'est
ni réglementée, ni contrôlée
en Inde de façon à éliminer tout
danger pour les travailleurs et pour
l'environnement.
Ce même point sur
l'élimination sans danger pour la santé
humaine est repris dans la réglementation
française à l'article L-541-40 qui traite
de l'exportation des déchets dans le Code de
l'environnement, article dont la méconnaissance
est pénalement sanctionnée. On ne peut donc
se satisfaire des bonnes paroles de l'administration
française (les Domaines) et de l'entreprise
indienne, signataires du contrat.
Dans l'état actuel
du dossier, il nous apparaît que l'envoi du
Clemenceau en Inde pour démolition avec 22 tonnes
de déchets d'amiante à bord est
illégal, et qu'en conséquence, la
totalité du désamiantage doit être
réalisée en France.